CR de la Maxi Race du lac d'Annecy
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Maxi Race du lac d'Annecy en relais avec Carole, Cécile, Laure
« Il faut toujours viser la lune, car même en cas d’échec, on atterrit dans les étoiles » O. Wilde.
Je m’échauffe sur la piste cyclable qui longe le lac. Il est 3h30 ce samedi 31 mai 2014. Dans la nuit les frontales dansent, tremblotent, en écho aux étoiles posées sur le Mont Veyrier.
Dimanche dernier nous nous sommes retrouvées à Villaz, Carole, Cécile, Laure et moi la quatrième cinglée de ce défi au nom évocateur, la Maxi race du lac d’Annecy en relais. Je n’ai pas trop couru cet hiver, bien occupée par mes sorties de ski de rando et d’ escalade . Et de nature plutôt flâneuse et butineuse je suis à la peine pour m’imposer un entrainement régulier ! Maïlys est là et sa présence me réconforte. Vertu secrète de la baguette magique de notre fée coachette ? Les sensations sont bonnes. Mes cops d’aventure (je ne connais pas encore Cécile et Laure) sont hyper-motivées et … géniales ! Mes doutes s’envolent. Et aussi je ne ressens plus cette vilaine tendinite au talon qui m’avait forcée à l’abandon sur le trail des Aiguilles Rouges (un jour de septembre où j’ai voulu allé jouer dans ce trail des grands).
Je vais faire le premier relais, la montée du Semnoz (19km et 1500m+). Le départ, prévu à 4h, est tout proche. La tension monte. Ma frontale et ma montre Garmin, qui fait aussi gps, sont déjà en action. Mes cops sont là et leur présence est bien sympa. Elles sont géniales, mais je l’ai déjà dit. Je repense à nos fou-rires de la veille pendant l’essayage des Teeshirts de course roses, et trop courts de 8cm (mesuré par Cécile) …
Les 4 km premiers km sont plats et menés à une allure de folie. J’attaque la montée avec des forces déjà bien entamées ! Je me concentre pour trouver les meilleurs appuis et éviter les cailloux et autres racines d’épicéa et, accessoirement, les autres coureurs. J’aime assez courir de nuit à la lumière d’une frontale qui sautille de bonheur et pose sa bulle de lumière sur un chemin tout parfumé d’inconnu.
Les ours blottis (je les devine aisément) derrière les troncs d’épicéa doivent bien rigoler à la vue de cette cohorte haletante et éclairante.
Cette fichue montée me fait flirter avec ma limite et je me sens bien misérable. Il faut absolument que je termine en moins de 3h30 ! Je me cale derrière une runneuse avec des boosters roses et noirs et ne la lâche pas d’une semelle de mes … « waouuh les trails shoes neuves !» Une belle surprise m’attend à une traversée de route où mes équipières et Simon (logistique de la course) m’acclament et m’encouragent. Nous avons choisi de nous suivre sur tout le parcours. Ces retrouvailles au fil de nos relais font partie des moments inoubliables de notre aventure. La clarine des alpages et de Carole tintinnabule encore dans mes oreilles et aussi dans celles des ours.
Je dois ralentir pour pouvoir avaler un gel. Ce sera mon seul aliment de toute la grimpette. Le ciel s’éclaircit mais le brouillard qui s’installe et les frondaisons sombres des épicéas retiennent encore la nuit sur le chemin. Je relance et rattrape booster rose et noir. Ma Tikka est à bout de souffle. Je l’avais pourtant testée avant le départ ! Mais je l’ai utilisée toute ma saison de ski de rando, fidèle compagne de mes départs parfois bien matinaux. Je finis par trouver mon rythme mais 20km c’est quand même court et je dois relancer sans arrêt. La montée est régulière et je m’impose de courir à ma limite. En haut çà sera fini et peu importe dans quel état j’arrive.
A 6h30 Carole me demande ma position. Je tape 15 sur mon clavier. Cécile doit prendre le relais suivant. Elle doit commencer de se préparer. Aussi, une puce est épinglée au dossard et permet un suivi des coureurs au passage des points de contrôle. C’est bien pratique pour les prévisions des relais. Magie de la technologie !
Je sors de la forêt et laisse les ours à leur tranquillité retrouvée. Le sommet du Semnoz explose d’insolente lumière. Le soleil qui se lève, par-dessus les Aravis, pose des étoiles dans la rosée de l’alpage. Les ombres s’étirent comme les ailes des choucas qui se jouent de l’ascendance. La mer de nuages pose son infini tapis sous les yeux de runneurs ébahis. Le vent du nord joue dans le bleu du ciel.
Je suis heureuse d’être là, d’avoir bouclé mon relais en 3h05, de retrouver mes cops et leur sourire. Je passe le relais et le dossard à Cécile. Déjà elle s’élance dans la descente vertigineuse du Semnoz … A la limite de la nausée je ne peux avaler qu’un carré de fromage et un verre de coca. Je déconnecte et m’écroule sur la banquette arrière de la voiture de Laure … où des crampes viennent vite me rappeler mon manque d’entrainement en cap.
Parties à 4h nous bouclerons notre périple à 19h45 (dans un final de légende, avec notre Laure qui termine son relais en donnant tout), avec une belle marge sur l’horaire, et d’élégante façon. Belle réussite d’une équipe de killeuses avec un mental toujours au top, y compris dans les passages difficiles et les moments de peine … bonheur de trail. Merci les filles. Vous m’avez remplie la tête d’étoiles et vous m’avez posée sur un nuage. J’y suis encore.
Et mille excuses aux ours du Semnoz que j’ai dérangés en cette nuit du 31 mai. Mais vous m’avez déjà pardonnée, je le sais. Car c’était la nuit de la Maxi Race …